Théâtre complet / Étienne Jodelle

III, Didon se sacrifiant - Théâtre complet III

En choisissant le personnage de Didon, Jodelle poursuit dans la voie qu'il a ouverte en 1553 avec Cléopâtre captive. Il fait voir la chute d'une héroïne dans le malheur et met sur la scène française un sujet à la mode. Comme Cléopâtre, la reine de Carthage a déjà retenu l'attention des dramaturges italiens. Si Jodelle lui confère un statut tragique sans ambiguïté, la tragédie cependant ne réussit pas à se dégager de l'épopée. A bien des égards, Didon se sacrifiant se présente comme une suite de fragments plus ou moins longs d'une Enéide éclatée. Nombre de procédés épiques y sont repris et, comme chez Virgile, l'ira deorum est le ressort essentiel de l'action. "Grand libertin" toutefois, Jodelle refuse la religiosité de son modèle latin et dénonce le "fart" de la religion. Cette dimension critique et didactique de la tragédie montre que la psychologie et la vraisemblance l'emportent moins que le souci de délivrer une leçon grâce à des personnages qui sont autant d'exempla.
Le texte proposé ici reprend celui du recueil posthume des Oeuvres et Meslanges poétiques édité par Charles de La Mothe (1574). Ont été reportées en notes quelques variantes des éditions de 1583 et 1597.