Colloque - La Fraternité à l'épreuve de la déportation - Université Catholique de Lille

Décédée en avril 2008 à l'âge de cent ans, Germaine Tillion a connu un destin exceptionnel. Ethnologue et historienne, elle est l'une des premières résistantes en France, avant d'être déportée à Ravensbrück. Pendant la guerre d'Algérie, elle se bat pour empêcher l'horreur qui s'installe dans les deux pays qui lui sont chers : l'un a été son terrain de recherches, l'autre est sa patrie bien-aimée.
Au retour du camp, Germaine Tillion avait compris que les résultats des sciences humaines dépendent étroitement de la personnalité de celui qui les pratique. Elle avait donc conçu le projet de raconter son apprentissage scientifique en évoquant les grands événements de sa vie. Tzvetan Todorov a essayé de reconstituer ce travail inachevé. Composé au deux tiers de textes inédits, puisés dans les archives récemment classées, l'ensemble s'articule en cinq grandes séquences ( Ethnologue en Algérie, Résistance et prison, Déportation, Après le camp, La guerre d'Algérie ). Récit continu d'une vie intense, le livre révèle à la fois un écrivain de premier plan et un penseur original.


Dans cette troisième et dernière version de son ouvrage sur Ravensbrück, Germaine Tillion essaie de combiner, selon ses propres mots, " la grande lumière blanche de l'enquête historique, qui illumine de toutes parts les reliefs et les couleurs, avec l'obscur rayon de l'expérience qui traverse les épaisseurs de la matière. Non pas la seule raison, non pas la passion seule, mais l'une et l'autre ensemble, unissant leurs insuffisantes clartés pour explorer ce gouffre inconnu, le malheur des autres ".
Cette édition est enrichie d'enquêtes sur les exterminations par le gaz, menées par Anise Postel-Vinay pour Ravensbrück et par Serge Choumoff pour Hartheim, Gusen et Mauthausen.


Charlotte Delbo était une des 230 femmes qui, dans Le Convoi du 24 janvier, partirent en 1943 de Compiègne pour Auschwitz.
"Aucun de nous ne reviendra" est, plus qu'un récit, une suite de moments restitués. Ils se détachent sur le fond d'une réalité impossible à imaginer pour ceux qui ne l'ont pas vécue. Charlotte Delbo évoque les souffrances subies et parvient à les porter à un degré d'intensité au-delà duquel il ne reste que l'inconscience ou la mort. Elle n'a pas voulu raconter son histoire, non plus que celle de ses compagnes ; à peine parfois des prénoms. Car il n'est plus de place en ces lieux pour l'individu.


Alors vous saurez qu'il ne faut pas parler avec la mort c'est une connaissance inutile Une connaissance inutile est le troisième ouvrage de Charlotte Delbo sur les camps de concentration. Après deux livres aussi différents par leur forme et leur écriture que Aucun de nous ne reviendra et Le Convoi du 24 janvier, c'est dans un autre ton qu'on lira ici Auschwitz et Ravensbrück. On y lira plus encore une sensibilité qui se dévoile à travers les déchirements. Si les deux précédents pouvaient apparaître presque impersonnels par leur dépouillement, dans celui-ci elle parle d'elle. L'amour et le désespoir de l'amour – l'amour et la mort ; l'amitié et le désespoir de l'amitié – l'amitié et la mort ; les souffrances, la chaleur de la fraternité dans le froid mortel d'un univers qui se dépeuple jour à jour, les mouvements de l'espoir qui s'éteint et renaît, s'éteint encore et s'acharne... Auschwitz et après, aux Éditions de Minuit : I. Aucun de nous ne reviendra (1970), II. Une connaissance inutile (1970), III. Mesure de nos jours (1971).


Et toi, comment as-tu fait ? pourrait être le titre de ce troisième volume de Auschwitz et après. Comment as-tu fait en revenant ? Comment ont-ils fait, les rescapés des camps, pour se remettre à vivre, pour reprendre la vie dans ses plis ? C'est la question qu'on se pose, qu'on n'ose pas leur poser. Avec beaucoup d'autres questions. Car si l'on peut comprendre comment tant de déportés sont morts là-bas, on ne comprend pas, ni comment quelques-uns ont survécu, ni surtout comment ces survivants ont pu redevenir des vivants. Dans Mesure de nos jours, Charlotte Delbo essaie de répondre, pour elle-même et pour d'autres, hommes et femmes, à qui elle prête sa voix. Auschwitz et après, aux Éditions de Minuit : I. Aucun de nous ne reviendra (1970), II. Une connaissance inutile (1970), III. Mesure de nos jours (1971).