Matérialisme et passions

La modernit, ds ses dbuts, attribue un rle-clef aux passions: quelles soient hostiles la Raison ou au contraire ses allies, dangereuses ou fascinantes, elles marquent le rle du corps, du dsir, du langage et de limagination dans la nature de lhomme. La mme poque voit se dvelopper diffrentes variantes du matrialisme. Presque toutes rvaluent ce que la raison classique avait tendance rprimer ou considrer comme rvlateur de la faiblesse humaine: le corps et tout ce qui, dans lme ou dans la socit, porte les traces de lactivit et de la positivit du corps. On peut donc sattendre ce que les matrialistes fassent un sort particulier aux passions, ce quils y reconnaissent des lois et non pas seulement des manques ou des vices, ce quils essaient den reprer lefficace dans lensemble des activits humaines. Encore faut-il se demander comment chaque matrialisme procde, par quelle configuration propre il rend compte de ces phnomnes ou comment il dvie les discours de la thorie classique pour les forcer passer par les objets qui sont les siens. Plutt que de supposer lexistence dune thorie matrialiste unique, une enqute simpose donc qui prenne en vue la diversit de ces auteurs, les situe dans leur contexte et repre les points dinflexion que rencontre chez chacun dentre eux cette problmatique gnrale des passions qui semble avoir gouvern plusieurs sicles.