Yv

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Je lis, je lis, je lis, depuis longtemps. De tout, mais essentiellement des romans. Pas très original, mais peu de lectures "médiatiques". Mon vrai plaisir est de découvrir des auteurs et/ou des éditeurs peu connus et qui valent le coup.

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10 septembre 2016

Là, c'est le ton qui ne m'agrée point. L'écriture que je ne trouve pas à mon goût. Elle joue avec des touches d'humour qui ne m'atteignent pas, les saillies ne me font pas rire ni même sourire ; il en va de l'humour comme des goûts et des couleurs, je le constate ici encore une fois. Sous prétexte de liberté et de modernité, elle est parfois un poil pédante, ne faisant pas forcément confiance à l'intelligence du lecteur, qui peut en avoir même sans en avoir l'air.

Je ne doute pas que ce roman trouvera son public, mais je crois qu'il n'est tout simplement pas pour moi.

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10 septembre 2016

Il y a longtemps que je voulais lire Metin Arditi, suite à beaucoup d'articles élogieux sur ses livres. Manifestement, je n'ai pas choisi le bon titre, parce que je m'y ennuie ferme. Les personnages sont intéressants, les paysages itou, mais le tout traîne en longueurs... Le romancier tourne en rond et fait tourner ses héros de la même manière -ce qui est fort logique, me direz-vous car tourner en carré, ce n'est guère aisé. Je ne parviens pas à m'intéresser aux vies décrites, ni aux relations entre les protagonistes, ni au pays et aux modes de vie, ni même à l'écriture de Metin Arditi que je trouve classique -pour ne pas dire banale-, sans profondeur. Rien, absolument rien ne me retient dans cet ouvrage. Dommage, mais je n'ai pas dit mon dernier mot avec cet auteur.

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10 septembre 2016

J'aime les livres de Jacques A. Bertrand depuis que je l'ai découvert il y a vingt ans avec son très beau "Le pas du loup" qui racontait les moments suivant le décès de sa maman et j'avais apprécié la délicatesse de l'auteur. Depuis, je l'ai relu plus ou moins fréquemment, pas toujours chroniqué soit parce que le blog n'était pas ouvert, soit parce qu'au début, je ne parlais pas forcément de tous les livres que je lisais. Néanmoins, j'ai écrit sur "J'aime pas les autres".

"Biographies non autorisées" est évidemment un moyen détourné de parler des autres et de lui-même, de son rapport à la vie, à l'amour, à la mort et à l'humour qui sauve -presque- de tout, de prendre soi-même ou la vie trop au sérieux, et qui par une pirouette permet de se sortir de toutes les situations : "Le clown est un gentleman. Roger Nimier affirmait un jour à Antoine Blondin que, dans certaines circonstances, l'homme élégant se devait de porter un nez rouge. Rien n'est plus vrai. Nous en avons toujours un dans notre poche. Chacun de nous a sa douleur secrète. Le port du nez rouge est fortement conseillé. Avec une larme d'élégance." (p.120)

Chez Jacques A. Bertrand tout est élégance et légèreté qui cachent la gravité et la profondeur ; ce "nous" par lequel il se désigne pourrait être de la prétention, mais il est de la discrétion, une manière de rester incognito. Dans sa Biographie non autorisée de moi-même, il finit ainsi un paragraphe dans lequel il reconnaît ne pas aimer se mêler aux foules -et que je pourrais rependre à mon compte si je m'en souviens suffisamment longtemps : "Il n'est pas impossible que je sois un peu snob. Je ne suis personne, soit, mais je ne voudrais pas qu'on me prenne pour un autre." (p.85)

Une écriture malicieuse et joyeuse qui sait se faire mélancolique lorsqu'elle évoque justement la mélancolie, poétique ou onirique lorsqu'elle s'attarde sur l'araignée, Athéna ou la première vague, plus sérieuse lorsqu'elle parle des fondamentalistes dans une Biographie non autorisée de l'Homo Fundamentalis qui résonne fortement depuis les derniers attentats : "L'intégrisme n'est pas l'intégrité." (p.124), un auteur malin et érudit sans être pédant, des chapitres bourrés de références, enfin, bref, une lecture réjouissante.

L'art de la chronique n'est pas aisé, Jacques A. Bertrand le maîtrise parfaitement en y instillant beaucoup de lui, ce qui les rend particulièrement belles, joyeuses, enlevées... A déguster sans modération.

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30 août 2016

Livre déconcertant, qui n'est pas, je le précise dès mon entame de chronique, un roman policier, bien qu'il se déroule en huis clos au commissariat. Déconcertant, parce qu'il débute très bien, dans un certain suspens, une tension puisqu'on ne sait pas trop où l'auteure et son héroïne veulent nous emmener, et que le rythme et le style de la romancière sont très prometteurs, et parce que ce qui m'a plu au départ a fini par me lasser. Heureusement que l'ouvrage ne fait que 136 pages, sinon, je crois que je ne serais pas allé au bout.

J'aime bien la construction en petits chapitres, un par jour d'audition. J'aime bien aussi le style fait de phrases hachées, qui collent au monologue d'Alice, qui sans doute, comme beaucoup d'entre nous, ne finit pas sa phrase avant d'en entamer une autre : "L'impression aussi que le mécanisme dont elle tentait de rendre compte, ce mécanisme ancré dans la réalité, avec ses étapes, ses effets, ses retentissements. Ce mécanisme, mené par Samuel Tison avec constance et détermination. L'impression donc, que ce mécanisme, pour eux, ne correspondait à rien, ne représentait rien." (p.51) Et puis parfois, ce procédé m'agace, parce que les phrases n'ont pas de sens -on dirait du C. Angot : "Il vivait qu'il régnait sur elle, sur eux, comme sur une basse-cour d'êtres vivants mais faibles et invertébrés." (p.87/88) Dans le même genre, j'ai aimé les répétitions du premier extrait. Stéphanie Chaillou en use pas mal, mais parfois, ça fait grincer des dents : "Les limites de ce qu'elle pouvait faire, de ce qu'il était possible d'assumer qu'elle fasse, qu'elle ferait, qu'elle avait fait aussi. Et elle n'était pas prête à faire n'importe quoi, me dit Alice Delcourt." (p.98/99) Là, je pense qu'elle atteint également les limites de cet autre procédé, le sens est altéré, et la phrase franchement très moche. Déconcertant donc parce que ce qui plaît au départ finit par fatiguer, l'auteure tire trop sur la corde. Déconcertant enfin, parce que je n'ai pas compris les fins de chapitres qui parlent du théâtre d'Alice, je ne dis pas qu'elles ne sont pas belles, mais elles arrivent de manière... déconcertante et ne m'ont rien apporté.

Néanmoins, je dois dire qu'à travers les questions de l'inspecteur et les réponses d'Alice, se révèle une femme qui ose dire ce qu'elle a subi. Le harcèlement moral n'est pas un sujet beaucoup traité dans le roman, je sais gré à Stéphanie Chaillou d'en parler, ce n'est pas facile, et malgré toutes mes remarques précédentes, c'est plutôt bien fait. De la même manière qu'Hugo Boris parlait des gardiens de la paix, dans son roman Police, de ceux qu'on ne voit pas, qui font le sale boulot, elle parle des petites gens, de nous les lecteurs, de ce qu'on peut vivre ou de ce qu'on entend autour de nous. Ce n'est pas une mode très partagée, les romanciers parlant souvent d'eux-mêmes ou de leurs congénères.

Grasset

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30 août 2016

Admirablement mené

Pas très facile à résumer ce livre si l'on veut ménager le suspense, il me faut être succinct et susciter l'envie de le lire, car il le mérite. C'est ma première lecture d'Hugo Boris et je tombe sur ce court roman au rythme rapide, haché, et bien qu'il ne s'y passe quasiment rien en terme d'action sur les 100/120 premières pages, il est passionnant. La tension monte pour le lecteur mais aussi entre les trois flics dans la voiture, le clandestin tadjik restant étonnamment silencieux et impassible. Le texte est nerveux, vif, phrases courtes et/ou très ponctuées, vocabulaire simple, langage oral -pas mal de dialogues mais point trop.

Il faut dire que la tension est plus que palpable entre Virginie et Aristide : ils ont couché ensemble, elle attend un enfant qu'elle ne veut pas garder, son mari ne sait rien ; lui, Aristide, un type un peu lourd, macho, réalise qu'il a laissé peut-être passer une occasion qui ne se représentera pas forcément : Virginie est une jolie femme, volontaire, courageuse, opiniâtre, une bonne policière, pas tout à fait libre mais presque.

Ces trois flics sont fatigués. Fatigués de ce qu'on leur demande de faire, de ne plus pouvoir couper entre vie privée et vie professionnelle. Fatigués des journées à rallonge. Flic, c'est un boulot qui colle à la peau. "En voiture, avant de démarrer, tant que l'anti-car-jacking ne s'est pas déclenché, il reste sur ses gardes. Même en jean, il est encore en tenue. Même au volant, avec les enfants qui chahutent à l'arrière, il est encore en patrouille. Dans les lieux publics, Pascale lui demande d'arrêter de dévisager les gens. C'est plus fort que lui, au point qu'on lui demande parfois : "On se connaît ?". Dans la rue, il insiste pour qu'elle tienne son sac côté immeuble. Dans les transports, pour qu'elle ne sorte pas son portable. Ils ont pour principe de ne pas se quitter fâchés. Parce qu'un jour, ce n'est peut-être pas lui qui l'appellera. C'est qu'il a épousé son travail d'abord, comme tous les flics du monde." (p.106)

Cette nuit sera celle des grands questionnements, des sentiments contradictoires qui les animent. Comment garder sa dignité en obéissant aveuglément aux ordres ? Quid de sa conscience ? De l'estime de soi ? Jusqu'où obéir ? Comment rester soi-même, ne pas avoir honte de ses actes ? Comment exister tout simplement ? Asomidin Tohirov, le clandestin sera le déclencheur involontaire de ce déferlement de questions. C'est lui, bien involontairement derechef, qui mettra les nerfs des trois flics à vif.

Admirablement mené, ce roman. Le style colle aux heurts et aux prises de bec des trois protagonistes, à leurs doutes, leurs questionnements. Il se lit rapidement puisqu'on ne le lâche pas une fois ouvert. Ce n'est pas un polar même si les personnages principaux sont des flics, c'est un roman très fort sur la difficile question qui conclut la quatrième de couverture : "Comment être soi, chaque jour, à chaque instant, dans le monde tel qu'il va ?"